mercredi 20 octobre 2021

Ma dixième étoile...

Silian pour LVI
L'objectif était clair : venir à bout de ce marathon en se basant sur un chrono d'environ 3H30, soit un rythme de course compris entre 4'50'' et 5' par kilomètre. La météo promettait d’être belle voir parfaite avec à peine 13°C prévus vers 13H à l'arrivée. Mon manque d'entrainement sur les trois dernières semaines m'imposa un changement tactique guidé par la prudence : Modifier mon sas de départ en choisissant les 3H30 et oublier les 3H15. La semaine de l'événement fut surtout consacrée à refaire un peu de "jus" et à m'occuper utilement la tête et le corps. Je vous fais grâce de la check list des choses à penser et à faire 48 heures avant l'heure H. 

 

Jour J (H-1), je rejoins mon nouveau sas de départ par un franc soleil qui transforme les Champs Élysées en une avenue teintée d'or. En attendant le "start" tant attendu, je fais la connaissance d'un drôle d'anglais qui s'est inscrit un peu au hasard à son premier marathon. Il est la plus simple expression du coureur à pied et ressemble en cela à Philippides à un détail près : il n'a pas de courrier ni de message. 9H40, les coureurs du sas bleu du marathon de Paris sont lâches après plus de 900 jours d'attente. Paris, tes marathoniens sont de retour!


oui je sais...pas de copy right...

Les nouveaux ajustements de parcours sont tout simplement magiques : Place Vendôme, l'Opéra Garnier, Avenue de l'Opéra. Mon rythme est bon, régulier et conforme à l'objectif. J'ai presque l'impression de faire une promenade de santé sur la fameuse "ligne verte" indiquant la trace la plus efficace. 5kms, 10kms, 15kms, Semi, 25 kms ça va, je gère. Je reste à l'écoute de mes ischio et ne suis pas encore totalement relâché mais la belle ambiance, le public en nombre et Paris sous le soleil commencent à me griser. Je prends du plaisir et chaque kilomètre me rassure un peu plus. Je vais y arriver et dans un chrono acceptable, maintenant c'est évident.



J'ai un rendez-vous au 35eme avec mes parents et enfants. Pas trop le temps de m'y arrêter, ils me poussent à repartir alors que mon corps aurait bien besoin d'une accalmie. J'ai la sensation de prendre le fameux "mur" du marathon. Cette fois, il est vraiment là et le combat va donc durer 7 kms. Je paie ma préparation finale escamotée et mes blessures mais je suis armé. J'ai ma botte secrète, mon arme absolue : Laurent. Je lui parle de son quartier qu'on vient de traverser, je lui demande de prendre un peu le relai, de me donner un bonus de force. Je repense aussi aux séances les plus difficiles comme mes sorties à Milos ou Sifnos. Ces sorties sont fondatrices et ont forgé mon mental, il est précisément l'heure de s'en servir.


Kilomètre 41, on y est presque Laurent! Je te l'ai promis et aujourd'hui je reprends Paris pour toi! Beaucoup de coureurs sont à la rupture. Probablement sous entrainés comme moi. Qu'elle me semble encore loin cette ligne d'arrivée. 2eme et dernier rendez-vous en famille sur la Place Dauphine en travaux (Merci Hidalgo!!), dernier virage et voici enfin la libération tant attendue. Le speaker et la foule font du bruit mais je suis dans une bulle. Je lève mes bras au ciel et crie mon message destiné à mon ami. L'instant d'après je franchis la ligne et mon corps s'est apaisé d'un coup. J'appuie sur ma montre, j’arrête mon chrono, je viens de terminer mon dixième marathon. Temps 3H29.On a gagné ensemble, on l'a fait à deux! Merci mon Laurent. 

Tous finishers, tous victorieux ou "Nenikekamen"(*) comme aurait dit Philippides...il est désormais temps d'offrir des vacances à son corps, de revivre normalement et de vivre un peu le "marathon blues" post-course car comme le dit si bien la coureuse (retraitée depuis peu) Flanagan : “In the midst of an ordinary training day, I try to remind myself that I am preparing for the extraordinary.” Ainsi quand on vient de vivre l'extraordinaire, il faut accepter de revenir à l'ordinaire...ou d'imaginer de nouveaux défis pour repartir à l'aventure. Une nouvelle ville marathon à conquérir? Devenir un meneur d'allure pour vivre le marathon autrement? To be continued...


(*) "nous sommes victorieux!" a dit Philippides avant de succomber.

dimanche 10 octobre 2021

La ligne et rien d'autre que la ligne...

Interview réalisée sans trucages dans l'appartement de Silian à J-7. Meudon par une belle journée ensoleillée.

"Bonjour Silian, ravi de te retrouver par la traditionnelle et rituelle interview d'avant course! Comment te sens-tu, que peux tu nous dire de ces derniers préparatifs avant dimanche prochain?"

Silian: " C'est la prépa la plus compliquée et difficile que j'ai pu vivre. Des bobos, des blessures, des terrains de jeux pas faciles et peut être un peu trop d'Ouzo...mais dans l'ensemble je me sens verni et chanceux de me dire que oui dans une semaine je vais tenter ma chance!"

"Quand tu me dis tenter ta chance, ça va dire quoi au juste?"

Silian: " Je me sens encore sur des œufs et je connais plus que jamais mes limites mais si j'applique à la lettre mon Plan ça peut marcher. L'idée sera de ne faire aucune faute, aucun écart ni chute accidentelle et surtout de respecter un rythme de course de 4'50'' à 5' au kilo pas plus pas moins..."

"Tu crains une nouvelle blessure?"

Silian: " Oui sur 15/20 kms ça doit tenir, au delà avec cette blessure et les derniers bobos je rentre dans une zone inconnue donc il faudra être à l'écoute de mon corps mais en même temps m'en distraire...J'ai prévu une set list à écouter pour faire une peu diversion."

"A ce rythme là tu peux espérer quoi?"

Silian: " Entre 3H30 et 3H35 mais franchement être "finisher" suffira à mon bonheur! Point positif il devrait faire beau pas trop chaud avec une super ambiance rendue à nouveau possible par 60 000 coureurs!"

"Quel a été le moment le plus marquant de ta prépa?"

Silian: " En fait je pense à deux moments. Le premier à Milos au coucher du soleil, j'étais en feu et j'avais des sensations incroyables. Le deuxième à Santorin, j'étais dans le dur mais je me disais qu'au fond ce genre de sortie paierait un jour, pourvu que cela me serve dimanche."

"Justement retrouver la course officielle avec du public tu espères quoi?"

Silian : " Courir avec 60 000 coureurs est une expérience inouïe, tu sens quelque chose de différent, tu franchis un niveau et ça te reste pour l'éternité. Tous ceux qui ont déjà couru ce type de distance te le diront: Marathonien un jour, marathonien pour toujours!"

"On va mettre de côté les bobos. Arrives tu à visualiser la fameuse ligne d'arrivée?"

Silian : "Oui depuis cette semaine j'y pense chaque jour. Je suis tendu mais à la fois tellement excité et c'est précisément pour cela que j'aime ce sport. Je n'ai jamais ressenti autant d'émotions qu'en course à pied et particulièrement lors d'un marathon. Pour revenir à la ligne, je la veux plus que d'habitude, je ferai TOUT pour l'atteindre quoi qu'il m'en coute!"

"Qu'as tu prévu ensuite?"

Silian : " Une bonne douche mais surtout une bonne bière! L'abstinence commence à me peser."

"Ta famille viendra sur le parcours?"

Silian : " J'aurai de bons et vrais supporters en la personne de ma maman accompagnée de mes enfants. Quoi demander de plus?"

"On te dis ..... et on espère un bel épilogue sur ton blog"

Silian : " Merci, que la fête commence et qu'elle se termine de belle manière pour moi et pour Laurent qui sera avec moi, dans mes jambes, dans ma tête et dans mon cœur, j'en suis sûr! "  



mardi 5 octobre 2021

Pour un Homme et rien d'autre.

un ruban presque plat de 800m..je prends!
Je confesse, j'ai replongé...L'idée de recourir la "suprême" course à pied dans ma ville après 2 ans d'interruption était trop forte. Pour cela il a fallu retrouver le chemin de l'entrainement, de la volonté et de la rigueur mais ça vous le savez déjà, non? Alors oui je suis passé par tous les stades qui précédent ce fameux jour "J". L'excitation de s'entrainer comme un pur amateur mais sans ménager ses efforts, sentir venir doucement la routine, essayer de s'en distraire, et puis se blesser comme un artifice pénible pour se remotiver et chercher désespéramment une issue favorable. La blessure, cette douce alliée qui remet les choses en place et te fait voir les choses autrement. Nombre de fois ou j'ai envié de simples coureurs depuis ma voiture en me disant "je donnerai beaucoup pour courir comme eux aujourd'hui". Être sur la touche me regonfle, me redonne l'énergie que j'étais en train de dissiper sur les pistes d'entrainement ou jai accumulé des centaines de kms. "Blessure" je t'aime un peu, à la folie, pas du tout... 
 
Les trois premières semaines d'entrainement ont coïncidé avec mes vacances en Grèce.Pas facile de respecter un plan d'entrainement dans les iles grecques. L'inexpérience des reliefs et des parcours rend la tache un peu compliquée mais renforce le côté aventure. Les températures et les "restes" d'ouzo m'ont permis de revendiquer le statut " made in Greece" mais soyons clairs l'entrainement était mal adapté à une prépa marathon et cela a laissé des traces. J'en tire quand même la satisfaction de pouvoir me dire après coup: "j'ai couru à Milos, Naxos, Sifnos et Santorin...". J'ai agrandi mon royaume de "course à pied" et j'aurai laissé un peu de ma sueur dans de beaux endroits. 
 
 
La caldera à portée de pied

Retour à Meudon début septembre, le teint encore bien bronzé, il est maintenant question de retrouver du plat et du rythme. J'alterne prudemment les séances techniques et fondamentales en les consolidant parfois de séances de vélo en salle ou de piscine. J'attends, sans me l'avouer, la blessure. Elle finit bien sûr par arriver. J'avais RDV avec elle, comment aurais-je pu oublier? Protocole de soins, tout reprend une place calculée, pesée. Tout ce qui me paraissait secondaire reprend d'un coup de l'importance. J'accepte ce défi même si je suis loin d'en maitriser l'issue. J'adapte le plan, je fais des aménagements, je négocie avec mon corps. Après une première reprise le constat est à la fois positif,je recours; mais teinté de contraste, j'ai perdu le rythme et le bénéfice des 6 semaines passées. J-15, j'ai changé de chaussures, je porte parfois un strap pour me rappeler mes limites. Je ressens du mieux mais soyons clairs, je suis assez loin de l'extase...Je tente un bloc de 5 kms à mon rythme marathon et à la toute fin de celui-ci je sens que j'aggrave un peu mon cas. Je ressors le lendemain en me disant "ça passe ou ça casse" et naturellement ça casse... 
 

Séquoia 314 forever!

Je ne vais pas m'apitoyer car j'ai mis depuis longtemps le chrono de côté. Ce que je voudrai c'est simplement finir une histoire que j'ai commencé. J'accepte très volontiers de mettre de l'eau dans mon vin à condition qu'on me permette de courir. Égoïstement je veux ma part de réussite dans cette aventure mais je veux surtout la partager avec l'Homme qui m'a "accidentellement" incité à courir. Je veux que cette ligne d'arrivée soit la sienne, peu importe le temps et l'effort. Je le cours pour lui et c'est bien la chose la plus naturelle que je puisse faire. Ce serait pour moi le 10eme et pour "LVI" le premier. Que cela soit écrit et se réalise...